LE REALISME
"Le réaliste, s'il est un artiste, cherchera, non pas à nous montrer la photographie banale de la vie, mais à nous en donner la vision plus complète, plus saisissante, plus probante que la réalité même."
Maupassant, préface de Pierre et Jean
Comment lire une page réaliste ?
Comment écrire "à la manière" de Flaubert ?
"La nature de cette langue est d'être claire, logique, nerveuse", préface de Pierre et Jean, Maupassant
« Ce qui se conçoit bien s'énonce clairement », Nicolas Boileau, "Art poétique"
LE REALISME : la concision et l'impassibilité de Flaubert (le « dé-lyre » réaliste)
« Emma silencieuse, regardait tourner les roues », Madame Bovary
Comment écrire "à la manière" de Flaubert : retrouvez la concision du style de Flaubert
[Tout à coup la Marseillaise retentit et Hussonnet et Frédéric se penchèrent sur la rampe pour voir le peuple qui se précipitait dans l'escalier et qui secouait à flots vertigineux, des têtes nues, des casques, des bonnets rouges, des baïonnettes et des épaules. On n'entendait plus que les piétinements de tous les souliers qui se mélangeaient au clapotement des voix, cependant que la foule inoffensive se contentait de regarder.]
« Pauvre petite femme ! Ca bâille après l'amour, comme une carpe après l'eau sur une table de cuisine. » Flaubert, Madame Bovary
« Il y a en moi, littérairement parlant, deux bonshommes distincts : un qui est pétri de gueulades, de lyrisme, de grands vols d'aigles, de toutes les sonorités de la phrase et des sommets de l'idée; un autre qui fouille et creuse le vrai tant qu'il peut », Lettre à Louise Colet, 16 janvier 1852
"Emma Bovary, c'est moi et ce n'est pas moi", Flaubert
« Ne me jugez pas d'après ce roman. Je ne suis pas de la génération dont vous parlez – par le coeur du moins. Je tiens à être de la vôtre, j'entends de la bonne, celle de 1830. Tous mes amours sont là. Je suis un vieux romantique enragé, ou encroûté, comme vous voudrez. », Lettre à Sainte-Beuve après son article sur Madame Bovary, 5 mai 1857
cf. les échappées romantiques de Madame Bovary qui donnent un caractère polyphonique au roman.
« C'est la contradiction qui donne la vie en littérature », Balzac, Illusions perdues
"La nature de cette langue est d'être claire, logique, nerveuse", préface de Pierre et Jean, Maupassant
« Ce qui se conçoit bien s'énonce clairement », Nicolas Boileau, "Art poétique"
LES MOUVEMENTS - LE REALISME : comment lire une page réaliste ?
Le roman et ses personnages : visions de l'homme et du monde
L'effet de réel : "miroir" de la réalité ?
"All is true"...
Fiche de synthèse : le réalisme dans le récit du XIXème siècle (p. 231)
Corpus de la séquence 15 (pp. 219-229)
Questions 1 et 2 (p. 221)
Questions 1, 2, 3, 4, 5 + "D'un texte à l'autre" (p. 229)
Documents polycopiés :
Les incipits et les portraits de romans réalistes du XIXème siècle
Le sujet de dissertation n° 16
Manuel de français : le roman, un "miroir qu'on promène le long d'un chemin" , Stendhal (exemple de dissertation rédigée, p. 539)
Romans réalistes : Le Rouge et le Noir, Stendhal ; Le Père Goriot, Balzac ; Madame Bovary, Flaubert ; Bel-Ami, Une Vie, Pierre et Jean, Maupassant
Lecture de programmes ou manifestes :
Balzac, Avant-propos à La Comédie humaine, 1842
Maupassant, préface de Pierre et Jean
"Le vrai peut quelquefois n'être pas vraisemblable"
Maupassant, préface de Pierre et Jean
En fait, le "Réalisme" est impossible à réaliser.
Toute représentation du "réel" est lecture(-re), art, au sens d'artifice.
Toute visée didactique implique une transformation du "réel", une médiation.
Le roman dit "naturaliste" suit la logique du réalisme.
LE "DE-LYRE" réaliste
Les précurseurs du réalisme appartiennent à la génération romantique de 1830. En rupture avec l'idéalisation des siècles précédents, ils manifestent les premiers la volonté de peindre de manière exhaustive (Balzac) et minutieuse (Stendhal) le réel dans ses composantes psychologiques, sociales et historiques. Ils se sont attachés à observer les moeurs et à donner l'illusion du réel en inscrivant l'action dans la réalité. Les lieux décrits deviennt des représentations exactes de la réalité.
Stendhal, Le Rouge et le Noir, "Chronique de 1830"
Balzac, La Comédie humaine
Zola, L'Histoire naturelle et sociale d'une famille sous le Second Empire (la série des Rougon-Macquart)
L'observation :
Avec Flaubert et les réalistes de 1850, ce courant principalement romanesque précise ses objectifs : prendre ses distances avec l'idéalisation romantique, "peindre le dessus et le dessous des choses", déclare Flaubert, "faire beau" grâce au "faire vrai". Cette ambition s'accompagne d'une traque documentaire des "détails" révélateurs de la nature des choses comme de celle des individus dans leur interaction avec le milieu social.
Le romancier réaliste rivalise avec la peinture, l'histoire et les sciences (les sciences exactes et les sciences de l'homme naissantes, la sociologie et la psychologie).
Il cherche à reproduire la réalité du quotidien (Balzac aurait inauguré « le roman où l'on mange »), à explorer tous les milieux sociaux (le peuple comme la bourgeoisie), à prendre en compte les explications scientifiques des comportements humains.
Il développe son sens de l'observation ("les inventaires de commissaire-priseur", les minutieuses descriptions de Balzac : "la description est elle-même l'action") et décrit avec précision le cadre spatio-temporel dont les personnages sont indissociables (l'espace devient "sécrétion humaine"): "enfin toute sa personne implique la pension comme la pension explique sa personne", Balzac, Le Père Goriot)
Les "effets de réel" (ou l'"illusion référentielle") : l'esthétique se veut objective.
La caractérisation du personnage commence par son nom ou son prénom. Ses autres caractéristiques sont principalement physiques, psychologiques ou morales. Toutes ont pour but de lui prêter une existence autonome et de lui donner vie et consistance dans l'imagination du lecteur.
L'enquête sociale : le personnage est surtout caractérisé historiquement et socialement par une condition et/ou des convictions et par sa "voix", c'est-à-dire par le style de son langage, quelle que soit la façon dont ses paroles sont rapportées (discours direct, indirect ou indirect libre comme souvent chez Flaubert et Zola). Dans Le Père Goriot de Balzac, Rastignac est "fils d'une famille noble", Julien Sorel, dans Le Rouge et le Noir de Stendhal, est "fils de bûcheron" et admirateur de Napoléon.
=> sujet de dissertation n°16 : " Un roman réaliste est un roman qui fait vivre devant nous dans un cadre minutieusement décrit – dont ils sont au reste inséparables – des personnages qui sont à la fois des types et des individus."
Pour renforcer ces effets, le romancier a souvent recours à la focalisation interne et au discours indirect libre. Il use (et abuse parfois) d'un vocabulaire technique, du détail vrai.
Les portraits de Mme Vauquer (Le Père Goriot, Balzac), de Catherine Leroux (Madame Bovary, Flaubert), de Jeanne (Une Vie, Maupassant).
Le cadre spatio-temporel : le portrait des personnages s'inscrit dans le cadre d'une description du cadre de vie qui précède souvent son entrée en scène (la description de Verrières dans Le Rouge et le Noir de Stendhal, celle de la pension Vauquer dans Le Père Goriot de Balzac ou du passage du Pont-Neuf dans Thérèse Raquin de Zola). La "captatio benevolontiae" de l'incipit se présente de façon plus variée : la description du cadre spatio-temporel, une scène (l'arrivée du nouveau et le chahut de la salle d'étude dans Madame Bovary de Flaubert), un portrait en action (Bel-Ami de Maupassant). Le héros est rarement décrit de manière statique (cf. Le premier portrait de Rastignac) : Zola met en scène l'arrivée d'Etienne Lantier aux mines de Montsou dans Germinal ou celle de Denise et de ses frères dans Au Bonheur des Dames.